Me voilà une fois de plus, de retour à l'hôpital. Il faudrait vraiment que je songe à prendre un abonnement. Heureusement que j'ai une très bonne couverture sociale, sinon je serais déjà ruinée à l'heure qu'il est. L'infirmière qui m'a pris en charge m'a directement dirigée vers le médecin que j'avais déjà vu la dernière fois, le Docteur Anderson et ce, malgré mes réticences. Je ne veux pas être auscultée par lui encore. Il pose trop de questions. Il est trop intelligent et il ne gobe pas mes mensonges. Autrement dit, il est un danger pour moi, surtout aujourd'hui. La main posée sur mon bras, je tente tant bien que mal de dissimuler cette blessure. Alors que je nettoyais - fouillais dans - un placard (dans lequel Keenan m'a bien sûr interdit de mettre le nez), j'ai fais tomber un petit objet. Une détonation s'est fait entendre et un projectile a effleuré mon bras, emportant avec lui un petit bout de moi. J'ai juste eu le temps de reculer ma tête, pour ne pas voir cette balle s'y logée bien gentiment. Mon frère gardait un pistolet chargé à la maison...de mieux en mieux. Il me fallait trouver une histoire avant que ce médecin débarque. Ce n'était rien de grave, mais j'avais eu une sacrée frayeur et mon bras était quand même bien ensanglanté. Comment le justifier ? Un clou qui dépassait du mur ? Un accident de cuisine et un couteau volant ? Un miroir cassé ? Qu'est-ce que j'avais bien pu inventer à cette infirmière ? Alors que je réfléchis, la porte s'ouvre sur un Dr Anderson plus beau (et plus menaçant) que jamais.

- Mademoiselle Gribble, vous voilà de retour ! Me dit-il en consultant mon dossier. Il lève les yeux sur moi et je retiens mon souffle. Qu'est-ce qui vous amène cette fois-ci ? Une autre chute de cheval ?
Il sait que je mens...catastrophe ! Je tente de garder mon calme et essaie tant bien que mal de me souvenir de ce qui est inscrit dans mon dossier
- Et bien je....je...je me suis coupée en cuisinant... je réponds, en priant pour que ça passe.

En entendant sa tirade, je fais les yeux ronds, surprise par tant d'agressivité. Non mais pour qui il se prenait ce médecin pour m'agresser de la sorte. Non mais franchement. Sa mission était de me soigner pas de me fliquer comme ça. Et puis je ferais mieux de quoi ? Était-ce une menace ? Un ordre ? Je ferais mieux de rien du tout. Je n'avais aucun ordre à recevoir de lui et si je voulais mentir encore et encore, je le ferais, point barre. C'était bien mal me connaitre que de croire qu'une menace aurait un quelconque effet sur moi ! J'avais persévéré pendant un an pour me faire ma place auprès de mon frère, ce n'étaient pas quelques mots du Dr Anderson, aussi beau soit-il, qui pourraient me faire peur.
Vexée et sur la défensive, je descends du lit sur lequel j'étais assise, ignorant la douleur lancinante dans mon bras et me dirige vers la porte, avant de lancer au médecin sans gêne

- Hey bien docteur Anderson, je n'ai rien de plus a vous dire ! Si vous ne voulez pas me soigner, tant pis ! J'irais voir un autre médecin!

Alors que je pose la main sur la porte, les lumières de la pièce s'éteignent subitement, nous plongeant alors dans une semi-obscurité. Je marque une pause, légèrement hésitante, pensant que j'avais fait quelque chose de mal, avant de poser ma main sur la poignée et de tenter d'ouvrir la porte...en vain. Celle-ci résiste. J'insiste un peu, avant de comprendre : nous sommes coincés. Inquiète, je tourne la tête et jette un regard vers mon médecin, espérant qu'il sache quoi faire.  

Non mais c'était quoi son problème à ce docteur ?! Moi qui croyais qu'ils étaient censés être bienveillants, ce n'est clairement pas le cas. Depuis notre première rencontre, il m'agresse sans arrêt. Je veux dire, ok, je mens pour les raisons de mes blessures, mais de là à me traiter comme une moins que rien, faut pas abuser non plus ! Alors que je tente de m'échapper, je réalise que la porte est verrouillée. Génial ! Je me tourne vers le médecin histoire d'être un peu rassurée et ce que j'ai à la place, c'est une énième attaque, pleine de rudesse et de mépris. J'ai peur. Peur de la vie que je menais à cause de mon frère que j'aime, peur que quelqu'un découvre la vie que je mène, et peur à l'idée de me retrouver coincée ici, dans un hôpital, lieu que je déteste tant, avec certainement la seule personne qui me déteste et ne se gêne pas pour me le faire savoir...ça fait beaucoup de craintes. Les bras croisés contre ma poitrine et la main délicatement posée sur ma plaie, je marque une pause, tentant de me calmer. J'ai déjà parlé de ma légère claustrophobie . Non ? Et bien voilà qui est fait ! Après quelques secondes à tenter de calmer ma respiration, je reprends avec un calme surprenant

- Qu'est-ce que je vous ai fait pour que vous me détestiez autant ?!

C'était là ce qui me paraissait le plus plausible pour expliquer son attitude vis-à-vis de moi. C'était la seconde fois que je venais ici et la seconde fois qu'il s'adressait à moi de cette façon, sans que je ne lui aie jamais rien fait de mal. J'ai menti sur mes blessures ok, mais c'est quelque chose contre ma santé, pas contre lui. Alors pourquoi me détestait-il autant ?